Jain : « J’ai eu peur de disparaître après cette pause »

RENCONTRE. La Française aux 1,2 million d’albums vendus dans le monde revient avec un disque psychédélique et érotique après quatre ans d’absence.

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Jain sort The Fool, son troisième album.
Jain sort The Fool, son troisième album. © Manu Fauque

Temps de lecture : 6 min

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Parce que le printemps évoque le renouveau, la lumière douce et dorée, les rencontres en terrasse, rien de tel que le nouvel album de Jeanne Galice, alias Jain, pour renaître à la vie, mais surtout à l'amour ! À 31 ans, la Française a le cœur qui bat, ça s'entend. Après les tubes (Makeba, Souldier… 1,2 million d'albums vendus dans le monde), une nomination aux Grammy Awards pour ses clips, sa prestation à la Coupe du monde féminine de la Fifa, les tournées mondiales (trois cents dates, dont le prestigieux festival américain Coachella), elle a fait une pause de quatre ans, installée dans une cabane de pêcheur à Marseille, pour redescendre sur terre (et mer ?).

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C'est pourtant vers une galaxie lointaine, très lointaine, qu'elle s'envole dans ses nouvelles chansons, nées d'un coup de foudre en plein confinement. Après les morceaux énergiques aux mélodies irrésistiblement dansantes et aux résonances africaines, hip-hop, pop et orientales puisées dans les sons de son enfance passée entre le Congo, Dubaï, Abou Dhabi et Pau, Jain change de style. Place aux sonorités organiques, oniriques et orgasmiques des Beatles, Fleetwood Mac, Kate Bush, David Bowie, Michael Jackson, Madonna… Du disco rock psychédélique, sensuel, moderne, joyeux et entraînant. En cas de coup de mou, écoutez The Fool, vous verrez… Ce troisième opus, toujours produit par son complice Yodelice, donne tout simplement envie d'aimer. Rencontre.

Le Point : Après le succès de vos deux premiers albums, vous aviez un rythme effréné de tournée et avez décidé de faire une pause… C'était trop intense ?

Jain : C'était intense et surtout, je n'arrivais plus du tout à donner tout ce que je pouvais donner, c'était frustrant. J'avais un Bercy que j'ai préféré annuler parce que j'étais épuisée et que j'avais envie de bien le faire… Et puis finalement, il a été annulé à cause du confinement. C'était un signe ! Une tournée demande énormément d'engagement, d'être loin de ses proches, pendant longtemps.

C'était très fatigant physiquement parce qu'en plus, j'étais toute seule sur scène avec mes machines, je faisais 1 h 40, 1 h 50 de show, seule donc, et il ne fallait pas que je me plante parce qu'il y a tous ces gens merveilleux qui tournent avec moi, qui dépendent de moi… Ils m'aident énormément mais je dois aussi assurer. Je me posais plein de questions : Est-ce que je vais être capable de refaire un album ? Est-ce que j'en ai envie ? Est-ce que ma vie me plaît ? Qu'est-ce que j'ai envie de montrer aux gens ? Quel genre d'artiste j'ai envie d'être ? Qu'est-ce que je pourrais faire si je ne fais pas de la musique ? J'ai arrêté ma tournée à Tokyo en août 2019, et le confinement est arrivé rapidement après.

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Ce qui me manquait le plus pendant ces cinq années de tournée, c’est que je n’écoutais plus de musique.

Quelle est la première chose que vous avez faite après avoir dit stop ?

Ce qui me manquait le plus pendant ces cinq années de tournée, c'est que je n'écoutais plus de musique en rentrant chez moi, parce que je faisais des concerts tout le temps, et j'avais besoin de silence. Donc j'ai redécouvert ça. Recommencer à écouter des albums en entier, comme quand j'avais seize ans. J'ai piqué tous les vinyles de ma mère : David Bowie, Kate Bush et son The Kick Inside… Je les ai écoutés en boucle.

J'avais aussi besoin de me retrouver seule. Ce n'est pas très intime, une tournée ! Ça sent la chaussette, on est sans arrêt entouré, les moments de solitude sont rares. Donc j'ai loué un cabanon à l'anse de Malmousque à Marseille, avec une vue complètement dégagée sur l'horizon avec la mer, et j'y suis allée seule avec ma guitare. C'était juste une chambre, en fait, donc j'avais vraiment l'impression d'être de retour dans ma chambre d'ado, avec mon instrument, à écrire des chansons, d'être complètement maîtresse de mon temps… L'album est né dans une temporalité plus lente, où les choses venaient au fur et à mesure, ça se sent.

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Pourquoi Marseille ?

J'adore cette ville. J'ai grandi au Congo, à Abou Dhabi et à Dubaï, où il y a la mer, donc j'ai toujours cherché une proximité avec l'eau et les espaces dégagés. En plus, j'avais déjà l'idée de proposer un album qui soit aussi un jeu de tarot de Marseille…

Vous avez en effet dessiné la pochette de l'album vous-même, ainsi que des cartes de tarot, une carte par titre. On se fait tirer les cartes quand on est inquiet du futur, non ?

Seule ma mère me tire des cartes de tarot, je ne suis jamais allée voir quelqu'un, donc ça ne représente pas vraiment une inquiétude pour moi, mais un moment d'intimité familiale. J'ai eu peur de disparaître après cette pause, bien sûr ! On est dans un monde qui va très vite. Un nombre astronomique de musiques sort par an. Donc évidemment, je me suis demandé si les gens n'allaient pas m'oublier et si ma proposition musicale si différente de ce que je faisais avant allait choquer. Mais jusque-là, les retours ont été très positifs !

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Vous avez aussi publié en octobre CityZen, une bande-dessinée sur une ville écolo idéale et post-apocalyptique...

J'avais depuis très longtemps le projet d'une BD, mais je n'avais jamais le temps... Là, j'ai enfin pu passer à l'acte  ! J'ai co-écrit le scénario et les dialogues avec ma grande sœur Léa Galice, qui m'a initiée à la BD enfant et dont le rêve était d'en écrire une. Notre éditeur Dupuis nous a donné carte blanche, et le travail à quatre mains a été très fluide, tous les jours nous nous racontions la suite de l'histoire... Ensuite, Marcial Toledano et José Robledo ont fait les dessins. 

C'est un album sur l'amour, une première pour vous.

Je suis tombée très amoureuse pendant le confinement, ça a été une source énorme d'inspiration, donc l'album parle du sentiment de rencontrer quelqu'un, d'avoir les jambes qui tremblent et des papillons dans le ventre. Je n'avais jamais écrit de chansons d'amour. Avant, je parlais d'un amour très global, universel, mais pas personnel. Quand on tombe amoureux, ça prend le dessus sur tout. Avoir pu vivre ça aussi pleinement, sans être en tournée, sans avoir d'obligation temporelle ou de travail, c'est un luxe immense. Et de pouvoir l'écrire en chanson, de pouvoir prendre le temps de m'interroger sur mes sentiments… C'est la plus belle chose que j'ai eu l'opportunité de vivre.

Tout est plus difficile pour une femme que pour un homme !

Les femmes musiciennes disent souvent à quel point c'est difficile de construire une relation amoureuse.

Je pense que tout est plus difficile pour une femme que pour un homme ! [Rires] J'ai l'impression qu'on culpabilise plus de ne pas être présente. Et, oui, il y a plus d'hommes en tournée, dont les techniciens, parce que c'est toujours plus accepté pour un homme d'être loin de sa famille que pour une femme.

Même le sexe en tournée pour une femme est encore tabou, contrairement au mythe de l'homme rock star qui couche avec des groupies…

Après, on se fait toute une idée de la tournée, sexe, drogue, etc., mais en fait, c'est pas si glamour que ça.

Vous allez bientôt repartir sur la route. Qu'est-ce qui va changer ?

Cet album appelle à quelque chose d'organique, de chaleureux, donc il y aura des musiciens sur scène, ce que je n'ai jamais vraiment fait auparavant. On va donc réinterpréter tous les anciens morceaux comme Alright, à la manière des nouveaux, en faisant en sorte que ça reste hyper dansant.


The Fool (Columbia). En tournée de festivals cet été, puis en tournée des Zénith cet automne. CitiZen de Jain, Toledano, Robledo, Galice, Perez (éditions Dupuis).

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Commentaires (2)

  • beltig29

    Promo à gogo
    Sur Europe 1, on encense son album, émission spéciale. Un article sur le Point, Télé 7 jours, France Info, le Figaro, RFM etc. Elle a un attaché de presse très efficace.

  • fiolasse

    4 ans d absence... Si elle croit naïvement revenir au même niveau de notoriété, tant mieux pour elle, mais elle va vite déchanter. La tournée promo dans les médias n y changera rien.