Quand Michael Jackson était terrorisé par son père Joe

LES PAPAS MANAGEURS. Michael Jackson avait si peur de son père, Joe Jackson, qu’il vomissait avant de le voir. Jusqu’au bout, il l'a pourtant remercié pour son succès.

Par

Michael Jackson (ici en 1996) fut terrorisé par son père, Joseph.
Michael Jackson (ici en 1996) fut terrorisé par son père, Joseph. © WALTER DHLADHLA / AFP

Temps de lecture : 4 min

Lecture audio réservée aux abonnés

Sous sa fine moustache se nichait un sourire carnassier. Joe Jackson a toujours été un homme froid et autoritaire. Né dans un bled de l'Arkansas, il a passé une partie de son enfance près de Chicago, avant de devenir boxeur et ouvrier. Installé avec sa deuxième épouse dans une petite maison à Gary, dans l'Indiana, il a dix enfants. Ambitieux, il crée avec son frère un groupe de blues, The Falcons, qui ne perce jamais. Il pousse alors ses fils dans la musique.

La newsletter culture

Tous les mercredis à 16h

Recevez l’actualité culturelle de la semaine à ne pas manquer ainsi que les Enquêtes, décryptages, portraits, tendances…

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Les répétitions quotidiennes sont intenses pour Jackie, Tito, Jermaine, Marlon et Michael Jackson, baptisés The Jackson Five. Pendant des années, Joe les prépare à des concours, les fait jouer dès que possible partout où c'est possible… Ils se produisent même dans des clubs de strip-tease ! Selon le père, ses enfants ne répètent jamais assez. Battus, humiliés, ils devaient l'appeler « Joseph ». Et Joseph est toujours prêt à retirer sa ceinture pour les frapper de toutes ses forces à la moindre erreur, sous le regard impuissant de leur mère.

À LIRE AUSSI « Les papas manageurs » : retrouvez tous les épisodes de notre série

Michael Jackson se sent seul. Il est plus petit que ses frères, et supporte mal les brimades. Il pleure souvent, désespéré, surtout quand son père se moque de « son gros nez » et qu'il lui interdit de jouer au parc avec les autres enfants. Dans ces conditions, impossible de se faire des amis. Mais il a confiance dans les méthodes dures de « Joseph ». Après tout, elles finiront par payer…

En 1969, Joe décroche un contrat pour le groupe avec le prestigieux label Motown Records. Leur single « I Want You Back » est un hit. Les tubes (« ABC »…) se succèdent et le père fait travailler toute la famille : les filles Rebbie, La Toya et Janet rejoignent leurs frères sur les scènes des casinos de Las Vegas. Surfant sur le succès de sa progéniture, Joe crée son label (Ivory Tower Records) et signe d'autres artistes, qui ouvrent les concerts des Jackson. Une « win-win situation »… D'une main de fer, Joe gère tout : les changements de contrats, les tournées, les passages derrière la caméra… La famille s'installe dans une grande propriété en Californie.

Michael Jackson adulé mais déprimé

Michael, enfant star, devient un adolescent star, une idole pour midinettes. En pleine puberté, il a des boutons ? Son père lui répète qu'il est moche. Sa confiance en lui s'effondre. Au sommet de la gloire, Michael est déprimé. Pourtant, sans compter l'effet incroyable qu'il a eu sur la musique noire (en la faisant sortir du ghetto dans lequel elle était enfermée pour l'imposer dans tous les postes de radio et de télévision d'une Amérique majoritairement raciste), Michael Jackson est une incarnation réussie du rêve américain.

À LIRE AUSSI Tout ce que vous devez savoir sur le biopic sur Michael Jackson

En solo, produit par Quincy Jones, il mélange avec brio des rythmes hip-hop, pop, funk, rock pour en faire un rythme tout personnel, reconnaissable entre tous, sensuel, précis. Capable de faire remuer les os d'un squelette, le « roi de la pop » a touché le monde de manière irréversible. Rien ne pourra faire taire cette voix incroyable dont les aiguës montent en un cri jouissif aussi haut que les cimes. Il est adulé dans le monde entier.

Après le succès de son album Off the Wall (1979), Michael va pouvoir s'éloigner de ce paternel qui le scrute et le critique sans arrêt. En 1984, il change officiellement de manageur pour la sortie de Thriller, qui est encore aujourd'hui l'album le plus vendu de l'histoire (70 millions d'exemplaires). Petit à petit, ses frères et sœurs finissent à leur tour par virer ce père impitoyable, et par s'éloigner de lui. Pour retrouver son enfance perdue, Michael construit Neverland, un paradis pour enfants, avec les dérives que l'on connaît…À LIRE AUSSI Michael Jackson, Dr Jekyll et Mr Hyde au pays du sucre d'orge

À la fin des années 1980, l'image de la famille idéale craque définitivement. Le comportement dictatorial de Joe commence à se savoir. Certains Jackson coupent les ponts avec lui. Michael confirme de sa voix douce les abus subis lors d'une interview à Oprah Winfrey en 1993. Il admet qu'il reste tellement terrorisé par son père qu'il vomit avant de le voir. « Mais je l'aime, je lui pardonne », se reprend-il tout de suite. Il sait qu'il le regarde… Il excuse d'ailleurs ce comportement par les privations que Joe a subies lors de la grande dépression, le racisme enduré pendant la ségrégation…

Joe Jackon réclame sa part d'héritage

Chaque année, MJ continue d'honorer son père pour son anniversaire : c'est le « Joseph Jackson Day ». Joe, lui, ne voit pas ce qu'il a fait de mal. Après tout, ses enfants sont des modèles de réussite. Il répondra à l'animatrice, des années plus tard : « Je le punissais pour qu'il ne tourne pas mal, et mes enfants n'ont jamais fini en prison, je ne regrette rien. »

À LIRE AUSSI Pédophilie : « Leaving Neverland », le documentaire qui accable Michael JacksonLorsque Michael Jackson meurt d'une overdose en 2009, à 50 ans, ni son père ni ses frères et sœurs ne figurent dans son testament. Il est pourtant devenu un des hommes les plus riches du monde, rachetant les droits de 250 chansons des Beatles, d'Elvis, de Bob Dylan… Michael a tout légué à sa mère, à ses enfants et à des œuvres de charité. Joe, séparé de sa femme depuis des décennies, tente de mettre la main sur le magot et l'éducation de ses petits-enfants, placés selon le vœu de Michael sous la tutelle de leur grand-mère. Il attaque les exécuteurs testamentaires pour recevoir une pension de 15 000 dollars par mois.

Car malgré le succès de ses rejetons, le patriarche est ruiné. Endetté de 24 millions de dollars, il a dû se déclarer en faillite. Il a pourtant profité de l'image de son fils jusqu'au bout, lançant – sans son autorisation – des parfums à son effigie, ou en publiant un livre de photos de famille… Il mourra d'un cancer en 2018, à 89 ans, ne possédant plus que son appartement à Las Vegas. 

À ne pas manquer

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaires (2)

  • Palaprat94

    Thriller est sorti en novembre 1982, pas en 1984.

  • EV Suisse

    C’est ce que vous écrivez. Combien y a t il eu de maires de grandes villes noirs ou arabes en France ? Combien de président d’origine africaine ? Non, l’Amérique n’est pas et n’était pas majoritairement raciste pendant la carrière de M ; Jackson. Je vous rappelle le principe cher à Clémenceau quand il était rédacteur en chef : "une phrase se compose d’un sujet, d’un verbe et d’un complément. Pour les adjectifs, me voir. Pour les adverbes, prendre la porte